Eurybates joue à cache-cache avec les nuages

Jean-Marc, autre passionné du club, nous narre sa participation à un réseau européen d’observateurs

pendant une longue nuit solitaire … la tête en l’air !!!

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« Bonjour à tous,

L’un des avantages de l’eVscope (https://unistellaroptics.com/), réside dans sa fonction “science participative”.

L’idée est de mutualiser les observations afin d’avoir un télescope virtuellement de taille énorme. Dans le principe, plutôt qu’avoir un très gros matériel, on pointe plusieurs petits télescopes répartis sur la planète vers le même objectif.

Il existe plusieurs types de recherches possibles avec cet appareil :

  • La recherche d’astéroïdes,
  • La recherches d’exoplanètes,
  • La recherche d’objets présentant un danger pour notre vaisseau spatial Terre,
  • La recherche de comètes.

Les données recueillies sont ensuite analysées au Seti Institute (https://www.seti.org/).

Je n’avais encore jamais participé à ce programme, par manque de temps et aussi, les jours où j’aurais pu, à cause d’une météo défavorable.

Le 7 octobre dernier, j’ai reçu un mail indiquant le transit de l’astéroïde troyen 3548 Eurybates devant une étoile des Gémeaux (l’étoile HD51593). https://unistellaroptics.com/aidez-la-nasa-en-participant-a-la-plus-grande-observation-mondiale-de-lasteroide-eurybates/


Cet astéroïde va être exploré par la sonde Lucy en 2027. De ce fait, il est important de connaître sa taille et sa trajectoire avec précision. Il est accompagné d’une lune nommée Queta. https://fr.wikipedia.org/wiki/(3548)_Eurybate

L’observation est possible en Espagne, France, Belgique, Pays Bas, Allemagne, Danemark, Suède et Finlande.

Pour cette occasion, Unistellar s’est associé à l’Association Française d’Astronomie afin de créer un réseau d’observateurs le plus grand possible, car ce type d’occultation est également visible à l’aide de tout type d’instrument. https://www.afastronomie.fr/occultation-eurybate-23-oct-2022

La ligne de centralité est tirée entre Orthez et Reims, mais la trajectoire étant peu précise, il est important pour l’affiner et connaître la taille et la forme d’Eurybates d’observer plus large pour confirmer les connaissances, ne rien voir est aussi un résultat positif.

Arrive le samedi précédant l’observation, rentrant du travail, je profite du casse-croûte de midi pour regarder le dernier briefing de l’AFA (https://youtu.be/gPEP-DdTkl0), pour peaufiner l’observation. Là, Franck Marchis confirme qu’il faut observer depuis toute la France, et que si l’on se trouve loin de la zone de centralité, on va plutôt chercher le passage de Queta, la lune d’Eurybates.

Je récupère donc les données d’acquisition pour cet objectif, et direction la sieste pour être en forme cette nuit.

Vers 20h, arrive le choix du lieu d’observation, la météo est moche, il faudra passer entre les nuages. Sites météo, webcams …

Chasseral ? Crêt Monniot ? Ecurcey ? Ballon d’Alsace ? Grand Ballon ? Plateau des mille étangs ? …..
Ce sera sur les pas de notre prof d’astrophoto que j’irai, …. à Montancy là où, il y a quelques années, je débutais la photo astro.

Je charge le fourgon, et go pour le radar météo. Arrivé à 22h, c’est couvert de nuages d’altitude, petite reconnaissance pour voir où je poserai le trépied et au lit, réveil réglé à 3h00, l’occultation a lieu à 4h05 environ. les cloches des vaches me bercent.

3h, j’ouvre les yeux, je vois des étoiles par la fenêtre ! Le réveille-matin m’a tiré d’un étrange rêve où un copain de Normandie me téléphonait pour me dire que j’étais passé à la télé au sujet de l’occultation. Le cerveau est tout de même mystérieux parfois.
Les vaches dorment, plus de bruit.

Côté météo, c’est couvert vers les Vosges, les crêtes Jurassiennes semblent comme moi, sous le voile troué. Je n’y suis pas allé, car la webcam du Chasseral montrait des nuages accrochés à la montagne, je vois pourtant clairement les feux des éoliennes. Du côté de la Haute-Saône, rien, pas un nuage, mince, j’aurais peut-être dû privilégier Lure.

3h25, tout est en place, le tube se met en température, j’en profite pour faire un dark.

Dans un trou à travers les nuages, on voit Orion, je lance une reconnaissance du ciel dans ce secteur, ok le tube sait où il est. Je pointe vers la zone d’acquisition pour mieux voir où je regarderai.

3h45, un coup de masque de Bahtinov pour la mise au point sur une étoile d’Orion.

Je vois les étoiles bouger sur mon écran …. le vent !

3h50, Je décide de démonter le télescope pour pouvoir baisser le trépied à son minimum (oui je sais je dois commencer l’enregistrement à 4h02, You Only Live Once !).

Mise à l’horizontale du trépied, montage du tube, reconnaissance du ciel sur Orion à nouveau visible, il a un peu de mal mais y arrive, entrée des paramètres pour la capture de Queta, il y va, …. magie de l’eQuinox, 4h02mn et quelques secondes, je débute l’enregistrement.

Derrière moi, la Haute-Saône est couverte de nuages.

Les yeux sur mon smartphone, je regarde les étoiles, j’ai eu plusieurs occultations … par les passages nuageux ou pas …

7 minutes d’enregistrement. Ça ne bougeait plus, j’ai bien fait de baisser le trépied.

Le temps de ranger, d’aller dans un endroit plus approprié pour dormir, à 5h, je ferme les yeux pour finir ma nuit.

De retour à la maison, envoi des datas chez Unistellar, envoi des rapports d’observation et le dimanche est bien entamé. Un tour sur le channel discord dédié pour voir ce qu’on fait les autres chercheurs d’occultation.

La suite après le décorticage des données …

Jean-Marc »

4 commentaires

  1. Daniel

    Bravo et merci Jean Marc pour cet éclairage qui montre comment un réseau d’amateurs possédant des instruments modestes mais sophistiqués peut venir utilement épauler l’astronomie professionnelle et même la NASA.
    Et respect pour tous ceux qui auront passé leur nuit au froid pour quelques minutes de prise de vue !
    On est curieux et impatients de voir le résultat.

  2. Alain M

    Bien vu mon copain JM, il me tarde de voir tout ça en réel, je vois que tu n’as pas oublié tes débuts à Montancy, ça fait plaisir dommage cependant pour la météo…
    A + et merci.
    Al

  3. Jeanine

    Ben dis donc Jean-Marc, quel récit avec des détails aussi nombreux que les étoiles, enfin presque.
    Que de patience et d’endurance
    On attend le prochain épisode
    Merci de nous faire partager tes aventures célestes
    Jeanine

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